1. Parce que l’agent causal a été rapidement caractérisé, et s’est révélé relativement stable
Le 9 janvier 2020, les autorités sanitaires chinoises et l’OMS annonçaient la découverte d’un nouveau coronavirus, appelé 2019-nCoV, et présenté comme l’agent responsable des pneumonies notifiées à l’OMS le 31 décembre 2019 par la Chine. Dès le 10 janvier 2020 la séquence virale complète était rendue publique. Bien qu’il soit un virus à ARN, celui qui a rapidement été appelé SARS-CoV-2 est plus stable que la grippe ou le VIH par exemple. De ce fait, les vaccins développés à partir de séquences de virus isolés en janvier 2020 étaient toujours valides en décembre 2020.
2. Parce qu’on disposait déjà de connaissances sur l’immunité anti-coronavirus
L’immunité contre les coronavirus avait été largement étudiée à l’occasion des alertes de 2002-2003 (émergence du SARS-CoV en Chine) et 2012 (émergence du MERS-CoV en Arabie Saoudite). Des modèles animaux avaient été développés et des essais cliniques de phase 1 d’un vaccin à ADN codant la protéine S de ces deux coronavirus avaient montré la présence d’anticorps neutralisants chez les volontaires vaccinés. Il avait été montré que le déclenchement d’une réponse contre la protéine S ou que l’injection d’anticorps neutralisants permettait d’obtenir une protection contre l’infection.
Dès la séquence du génome du SARS-CoV-2 publiée, il a suffi de quelques jours pour produire à partir d’ADN de synthèse l’ARNm correspondant à la protéine S stabilisée en conformation pré-fusion (par deux résidus proline au niveau du site de clivage entre les sous-unités S1 et S2) ; cette conformation est en effet plus propice à l’induction d’anticorps neutralisants. Il s’agit d’un délai incomparable par rapport au temps nécessaire à la production de protéines ou la culture du virus nécessaires aux plateformes vaccinales classiques.
Par chance, les essais rapidement menés chez l’animal ont confirmé qu’il était assez simple de déclencher une réponse immunitaire efficace contre le SARS-CoV-2.
3. Parce que des recherches antérieures déjà très poussées ont permis l’utilisation de plateformes vaccinales innovantes
Avant la pandémie de Covid-19, les plateformes de vaccination de types acides nucléiques et vecteurs viraux avaient déjà été largement étudiées contre le virus Zika, le virus de la rage et le VIH par exemple, mais aussi contre les coronavirus SARS-CoV et MERS-CoV, sur des modèles animaux et dans des essais cliniques de phase 1 et 2. Ce sont donc des années de travail gagnées sur l’élaboration d’un vaccin contre le SARS-CoV-2. Ces plateformes ont été identifiées comme les plus intéressantes pour la mise au point de vaccins contre une maladie infectieuse émergente car elles permettent d’élaborer très rapidement le candidat-vaccin après identification de l’agent infectieux en cause.
4. Parce qu’un effort scientifique et financier sans précédent a été déployé
Une force de frappe jamais égalée a été déployée en réponse à la pandémie de Covid-19 : la mobilisation des équipes de recherche et des États et la création de partenariats public-privé ont facilité et accéléré le développement, la fabrication (anticipation du développement industriel) et la distribution des vaccins. Le programme interinstitutionnel américain "Operation Warp Speed" a par exemple permis le financement de plusieurs entreprises pour le développement de vaccins basés sur les nouvelles technologies. Autre exemple, « Covax » est la partie « vaccins » d’une collaboration mondiale pilotée par la CEPI (Coalition for Epidemic Preparedness Innovations), Gavi (Global Alliance for Vaccine and Immunization) et l’OMS visant à accélérer la mise au point et la production d’outils diagnostiques, de traitements et de vaccins contre la Covid-19 et à en assurer un accès équitable.
5. Parce que les essais cliniques ont été menés en un temps record
Dans le cadre de la pandémie, les différentes étapes du développement clinique des vaccins, permettant d’évaluer l’innocuité et l’efficacité des vaccins, se sont très rapidement succédé, voire chevauchées, en accord avec les autorités réglementaires de santé. Les volontaires ont été rapidement recrutés et les objectifs quantitatifs de cas de Covid-19 ont été rapidement atteints. Sans être dégradés, les processus de collecte et d’analyse des données et de vérification des vaccins ont été considérablement accélérés. La Food and Drug Agency (FDA) et l’Agence des médicaments européenne (EMA) ont créé des procédures pour accélérer ces étapes, sans déroger à la rigueur scientifique. Par exemple, la “rolling review” consiste à analyser les données fournies par les laboratoires toutes les deux semaines, permettant de réduire la durée du processus. In fine, comme dans d’autres circonstances, les vaccins ne sont autorisés que lorsque les autorités indépendantes confirment leur qualité, leur sécurité et leur efficacité.
Source : SPILF (Société de Pathologie Infectieuse de Langue Française), 15/02/2021.